RADIO UMWIZERO,

une radio de réconciliation au cœur de la région des Grands Lacs



Pourquoi créer une radio ?

Nul n'ignore plus aujourd'hui que le génocide au Rwanda, entre avril et juillet 1994, n'était pas une fatalité. Bien au contraire, les massacres furent l'objet d'une préparation de longue date. Dans cette minutieuse planification, la presse écrite et radiophonique a joué un rôle destructeur essentiel.

Ainsi, plusieurs mois avant la mort des Présidents rwandais et burundais, de nombreux journaux extrémistes avaient présenté à la population le massacre des Tutsis et de leurs complices comme l'ultime solution aux problèmes du pays. Plus déterminant encore fut le rôle de la Radio Télévision des Mille Collines, à l'époque écoutée par tous, qui incitait explicitement les extrémistes Hutus à chasser ou à tuer les Tutsis.

Cette sinistre " contribution " qui eut pour conséquence d'augmenter encore l'ampleur des massacres en légitimant l'idéologie génocidaire est là pour nous rappeler la formidable puissance de l'outil médiatique radiophonique dans des pays à tradition orale, tels le Rwanda ou le Burundi.

Face à un tel constat, l'Association pour l'Action Humanitaire (A.A.H.) à l'initiative de Bernard KOUCHNER et de Pierre PRADIER entreprend la création d'une station de radio libre et indépendante de réconciliation nationale émettant à partir de Bujumbura sur l'ensemble du territoire burundais.

Une mission d'évaluation entre les mois de juillet et septembre 1995 permet d'évaluer les réels besoins et les moyens nécessaires afin de réaliser notre action. Puis, grâce à l'appui financier de l'Union Européenne à travers le programme ECHO, la mission débute en octobre 1995 avec l'envoi de quatre expatriés : un chef d'antenne, un technicien, un journaliste, et une responsable administrative.



Radio Umwizero voit le jour

Après avoir obtenu toutes les autorisations administratives nécessaires, trouvé un local, fait venir, dédouanné et installé le matériel technique, recruté et formé le personnel, Radio Umwizero (espoir en kirundi) voit le jour le 19 février 1996.

Elle diffuse en modulation de fréquence sur l'ensemble du pays.

Dans un souci de stricte neutralité, Radio Umwizero véhicule des messages de paix et de réconciliation tout en observant le code de déontologie de la presse qui faisait tant défaut dans le paysage médiatique burundais.

Avant tout musicale, destinée aux jeunes, Radio Umwizero diffuse un programme rigoureux, diversifié et convivial pour proposer à chacun un espace de liberté. Sa vocation est de contribuer à une réconciliation entre toutes les composantes de la nation burundaise.

Pour cela, Radio Umwizero participe à la promotion de toutes les initiatives qui vont dans le sens des Droits de l'Homme, de l'unité, de la solidarité, du sursaut national et du développement. Ce message de paix s'appuie sur les associations de jeunes, de quartiers, sur les groupements de femmes, les ONG locales, sans oublier le soutien auprès des réfugiés et des déplacés.


Radio Umwizero a commencé sa diffusion en février 1996 avec 5 heures d'émissions quotidiennes du lundi au samedi de 15 h à 20 heures.

L'équipe locale se composait alors de 8 personnes : 3 journalistes, 3 animateurs, un technicien et un logisticien. Un an après, la grille des programmes s'est renforcée et Radio Umwizero a émis tous les jours de 14 h 30 à 21 h.

De nouvelles émissions sont apparues en fonction de l'actualité. Ainsi, en novembre 1996, lors du début des troubles au Zaïre a été mise en place une émission donnant la parole aux réfugiés " Parole aux réfugiés, familles retrouvées ". Radio Umwizero agit dans le camp de Gatumba, à la frontière zaïroise où s'entassent alors des milliers de personnes dans un camp de transit.




Le contenu des programmes

Au Burundi, 60 % de la population a moins de 35 ans ; nous avons donc souhaité, dès le début des émissions, que la radio s'adresse plus particulièrement à la jeunesse en proposant une tranche musicale assez large. Mais très vite, la diversité des programmes permet l'élargissement de l'audience à toutes les couches de la population. La grille des programmes comporte des programmes musicaux, des journaux d'informations et des magazines culturels.

Le programme musical est animé en trois langues : le kirundi, le swahili et le français. Sa principale fonction est de capter l'audience en diffusant de la musique et en ponctuant les chansons de commentaires originaux portant sur l'actualité musicale du moment, d'informations culturelles ou de conseils de vie pratique. L'équipe d'animateurs est aujourd'hui reconnue et réputée.

Une émission de dédicaces quotidiennes est inclus dans ces tranches horaires.

Des journaux d'informations en trois langues différentes sont proposés quotidiennement d'une durée totale de 12 minutes.

Des magazines hebdomadaires sont également proposés, traitant de sujets aussi variés que la culture traditionnelle, le sport ou la paix. A titre d'exemple, citons le magazine " On avance " dont l'objectif est de faire un gros plan sur les initiatives menées par les associations qui travaillent sur le terrain en valorisant la solidarité, les Droits de l'Homme et le développement socio-économique. Ou encore le magazine " Racines ", le magazine de la culture et de l'identité.



Conclusion

J'ai quitté le Burundi au début de l'année 97. A ce moment, Radio Umwizero était devenue un média incontournable au sein du paysage médiatique burundais.

L'absence d'instituts de sondage spécialisés rendait difficile la mesure réelle de l'audience, mais la radio était reconnue et appréciée pour la transparence et la neutralité de son information, tout comme pour l'impact positif des messages de paix et de réconciliation véhiculés au long de ses émissions.

Quelques éléments permettaient de confirmer cette affirmation : le nombre de lettres de dédicaces envoyées quotidiennement à la radio ne cessait d'augmenter, tout comme le nombre de candidatures spontanées provenant de toutes les provinces du pays.

De même qu'il n'était pas rare de croiser ces bus si typiquement africains servant de transport en commun, qui traversaient le pays en écoutant Radio Umwizero et en arborant ses " couleurs " alors même que la réalisation et la distribution de stickers à l'effigie de la radio n'étaient pas terminés.

Enfin, les demandes d'interviews de la part des associations ou des représentants de la société civile burundaise, afin de faire connaître leurs initiatives en " passant " sur Radio Umwizero étaient également considérables puisque la réalisation hebdomadaire des deux magazines qui leur étaient consacrées n'était plus suffisante pour répondre à leurs demandes.


Participer à la construction et à l'émergence de Radio Umwizero a été une expérience humaine et professionnelle enrichissante et inoubliable.

Mon expérience humanitaire s'est ensuite poursuivie auprès des enfants d'Haiti.

N'hésitez-pas à m'envoyer vos commentaires ou suggestions

celine.blazy@free.fr

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